Qu'on le veuille ou non, le nouveau boss food de la "French touch", c'est lui.
Nouveau RDV dans Pomélo en partenariat avec la crème Elle & Vire Professionnel : trouver et raconter les prochain(e)s grand(e)s de la pâtisserie en France, les futurs leaders du sucré aujourd’hui seconds, adjoints, sous-chefs et parfois déjà chefs pâtissiers (mais encore méconnus). Pomélo s’est appuyé sur son expérience. On a aussi appelé plumes spécialisées et stars de la pâtisserie pour débusquer de nouveaux talents, les rencontrer, goûter leur travail. Premier épisode avec Cassandre Dumont, sous-cheffe pâtissière à l’hôtel Burgundy (Paris).
Illustration Nicola Ferrarese pour Pomélo
Zygomatiques contractés, joues rosées, trémolo dans la voix… Comme l’impression que Cassandre Dumont, 28 ans, se prête pour la toute première fois à l’exercice de l’interview. Une fois installée face à nous dans l’un des fauteuils de la salle à manger du Baudelaire, restaurant étoilé de l’hôtel, l’intéressée confirme notre intuition : « Vous êtes sûrs qu’il n’y a pas erreur sur la personne ? ». Sûrs et certains. Doutes balayés et ego boosté, la jeune femme déroule finalement volontiers son CV.
L’obtention du bac pro à l’école Ferrandi d’abord, du CAP cuisine et de la mention complémentaire “dessert à l’assiette” ensuite – le tout en région parisienne dont elle est originaire, Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis) plus exactement. Puis, très vite, les premiers pas dans de grandes maisons. En 2016, c’est en tant qu’apprentie que Cassandre Dumont foule pour la première fois la moquette du mythique Taillevent (deux étoiles au guide Michelin). Pendant presque cinq ans, elle y gravit les échelons : commis puis cheffe de partie en pâtisserie. Et sans cette satanée pandémie, elle serait même passée sous-cheffe, lui avait-on promis. Là-bas, elle travaille un temps sous la houlette de la cheffe Kimiko Kinoshita (aujourd’hui en poste au restaurant parisien Aux 2 K) avant que cette dernière ne soit remplacée par le chef François Josse (désormais aux manettes de sa propre affaire, Familha, une boulangerie-pâtisserie en Ardèche). Autant de sources d’inspiration pour celle qui dit leur devoir respectivement son goût pour le travail des produits asiatiques et des herbes aromatiques en pâtisserie.
En 2021, Cassandre Dumont intègre la brigade de l’hôtel Burgundy, dirigée à l’époque côté sucré par le chef Pierre-Jean Quinonero (parti dans le luxueux Grand-Hôtel du Cap Ferrat du côté de Nice). Quelques mois suffisent alors à le convaincre de la nommer enfin sous-cheffe, poste qu’elle occupe ici depuis trois ans et demi. Dont bientôt deux sous la supervision du chef Léandre Vivier, son quatrième et dernier mentor en date. Auprès de lui et du reste de la brigade consacrée aux douceurs (une petite dizaine de pâtissiers en tout), la concernée dit avoir « trouvé sa famille de cœur ». De celles qui connaissent son amour sans borne pour le fromage au point de lui offrir un brie fourré à la truffe comme cadeau d’anniversaire. « Le rêve ! ».
Reste sa famille de sang. Le père, employé de banque. La mère, fonctionnaire. Le petit frère, la grande sœur et, surtout, Cécile, la jumelle avec qui Cassandre partage « absolument tout ». Notamment les romans, sa troisième passion après la pâtisserie et le fromage coulant – « je lis jusqu’à 600 pages par semaine », confie-t-elle. À raison d’une fois par mois environ, tout ce beau monde se réunit autour d’un rôti accompagné de pommes de terre et de haricots verts. Et, sauf à vouloir risquer le déshéritement, c’est toujours la pâtissière qui se charge d’apporter le dessert, un royal généralement, ce gâteau tradi (malheureusement passé de mode) fait de chocolat et de croustillant praliné. « Quoique je décide de leur faire, il faut que ça implique du praliné. Beaucoup de praliné. Pour eux, y en a jamais assez ! », plaisante-t-elle à moitié.
Les chiens ne faisant pas des chats, elle aussi se damnerait pour un paris-brest « bien chargé en praliné ». Mais professionnellement, Cassandre Dumont aspire à plus de créativité. « Je veux proposer des associations de saveurs dont nos clients n’ont pas l’habitude, à condition que le résultat reste toujours clair et lisible ». La preuve avec ce pré-dessert qu’elle a récemment imaginé pour être servi au Baudelaire (la table étoilée de l’établissement) et lors du tea time proposé au bar de l’hôtel : des tronçons de kiwi jaune marinés dans un bouillon thaï au gingembre, à la coriandre et au miel, puis surmontés d’un sorbet au wasabi et à la coriandre. À la dégustation, l’assiette se révèle, comme l’intéressée l’espérait, à la fois percutante et compréhensible.
Pourtant, Cassandre Dumont doute encore d’avoir trouvé sa « touche ». Celle qui, demain, fera d’elle une immense pâtissière. En attendant, la jeune femme œuvre chaque jour à forger la cheffe qu’elle veut devenir. Loin, très loin des quelques-uns « rétrogrades et à l’ancienne » qu’il lui est arrivé de croiser. Un exemple parmi d’autres : « Il y a dix ans, quand je cherchais un apprentissage, certains m’ont répondu qu’ils n’embauchaient pas de femmes, soi-disant parce qu’ils n’avaient pas de vestiaires », se souvient-elle. Et de conclure, voix posée et zygomatiques détendus : « À nous [notre génération, NDLR] de s’assurer que ces comportements ne soient plus tolérés ».
Il est partout : sur la carte à bord de l’Orient Express, en cuisine dans un nouveau restaurant du Mont Saint-Michel (le 21ème site le plus visité du pays), sur les menus du Martinez à Cannes, du Plaza Athénée à Paris, dans le palace de Bernard Arnault en plein milieu des Caraïbes (Cheval Blanc St-Barth) et depuis hier à Disneyland Paris, lieu n°1 des touristes en France avec 15 millions de visiteurs annuels.
Jean-Imbert Messieurs-Dames, 43 ans et une bouille qui en fait dix de moins. Il y a quelques années, le bonhomme m’avait invité à dîner avec lui en tête-à-tête dans l’”aquarium” du Plaza - sorte de pièce secrète vitrée installée face aux cuisines - et je me rappelle qu’il me disait que son rêve, plus jeune, était de devenir le chef cuisinier des dix plus beaux hôtels du monde. Le bougre y est arrivé quand on additionne à toute cette collection l’ancienne propriété de Marlon Brandon en Polynésie française (transformée en résidence de luxe), une table pour Dior à Paname ou encore un bateau historique en Egypte. Au cours de ces 20 dernières années, Alain Ducasse était synonyme de gastronomie à française chez nous et ailleurs. On faisait systématiquement appel à lui. En 2025, le symbole food de la “French Touch” s’appelle Jean Imbert. Le boss, c’est désormais lui, quand bien même il ne possède ni les 3 étoiles Michelin de Ducasse ni son réseau d’ex-collaborateurs et collaborateurs devenus à leur tour des héros de la scène culinaire hexagonale. Moins respecté ? Il y a de ça, mais pas moins ambitieux.
Pas grave, Imbert est moins une institution mais il est plus glam’. Et malgré ses succès, son fabuleux carnet d’adresses VIP et tout le luxe dans lequel il évolue professionnellement, il a réussi à conserver auprès du public et du milieu une (petite) part d’image plus “street”. Oui, c’est une star mais au-delà d’être une marque, il reste encore un homme, c’est moins le cas de Ducasse qui a cultivé (médiatiquement) ce côté “le roi et les autres” au risque de ne pas être proche des Français. Vous me direz que Jean Imbert n’est pas tout à fait proche des Français mais il fait davantage “Monsieur Tout-le-monde”. Oui, il prépare les oeufs de Bernard Arnault le vendredi mais il ne se prend pas totalement au sérieux, c’est en tout cas l’impression qui ressort grâce à des publications et stories Insta bien senties et pas trop léchées qui racontent sa cabane-potager dans les Côtes-d'Armor ou les membres de sa famille.
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